Techniquement parlant, Kyoto AnimationKyoAni pour les intimes – n’a réalisé que deux séries qui lui sont 100% originales. Ces séries, ce sont Munto TV et Tamako Market. La première est la version tv d’oav réalisés par le même studio entre 2003 et 2005. Et ce juste avant K-on ! qui a eu le succès qu’on lui connait. La seconde, diffusée en hiver 2013, est une comédie mignonne et qui se retrouve casée entre le moyen Chuunibyou demo Koi ga Shitai! et le seul KyoAni post-2007 que je n’ai toujours pas vu, Free!.
Bref, Tamako Market sort dans une période où KyoAni est en mode « moe moe kyun kyun » depuis le succès fulgurant de K-on !. La série ne déroge d’ailleurs pas à cette réputation : Tamako est très similaire à Yui Hirasawa (tête en l’air, naïve et voix aïgue) et le ton de la série se veut lui aussi très bon enfant. Du coup, on pourrait facilement passer à coté de Tamako Market tant la série semble passable.
Ce serait le cas à deux choses près : la série est particulièrement bonne sur certains aspects et son film. Surtout le film même. (et on commence par l’arrivée de Kanna. Parce qu’elle est top.)

Source : Sakugabooru

Avant tout, et pour bien introduire les choses, je vais parler un petit peu de la série. On y suit donc la petite Tamako Kitashirakawa, fille d’un fabricant de mochi (gâteaux de riz glutineux) qui va faire la rencontre de Mochimazzwi, un oiseau venu d’un pays lointain afin de trouver une épouse à son cher prince. Perdu, il est alors un temps hébergé par la famille de Tamako chez qui il découvrira (un peu trop) les saveurs du mochi. Résultat : il est devenu trop gros pour repartir et va donc squatter chez elle pendant douze épisodes. Hashtag c balo. Cette situation est assez représentative de l’esprit de la série, c’est ridicule, tout bête et rigolo.

Je n’en parle pas mais j’aime beaucoup certains morceaux de la B.O. et en particulieur Koi no Uta, la chanson d’amour écrite par le père de Tamako

Même si cela n’empêche pas à l’anime de développer quelques moments intéressants. Avec toujours une même thématique centrale : l’amour. Et dans son sens large, à savoir l’amour familial, fraternel, entre amis etc. Ce thème sera ainsi abordé de différentes manières avec les divers personnages de la série, comme au début avec Shiori Asagiri qui apprendra à devenir amie avec la bande de Tamako. On peut aussi compter Anko, la petite soeur de Tamako ou son père, toujours avec une légèreté appréciable tant ça rend le tout très subtil et naturel. Normalement je devrais aussi citer Mochizou mais le pauvre n’a pas vraiment l’occasion de s’exprimer sur ce point.

Et puis il y a toute l’histoire autour de Dera (mais si l’oiseau obèse là) qui sera rejoint plus tard par Choi, une servante du prince pour lequel cet oiseau était venu chercher une épouse. Mais concrètement, hormis des gags bien sympas, tout ce pan de l’histoire n’apporte vraiment pas grand chose à la série. Il y a bien le coté « Choi découvre l’amour d’un foyer hospitalier » (pour rester dans le thème) mais c’est à peu près tout.
Voilà ce qu’est, en gros, Tamako Market. Une comédie mignonne et drôle, bourrée d’amour (c’est le cas de le dire) et sans prise de tête. Ce qui inclut donc un scénario assez basique malgré quelques fulgurances. Mon gros coup de coeur allant à la romance entre les parents de Tamako (dont la mère est décédée) qui était superbe, notamment grâce à son magnifique morceau « Koi no Uta ». J’ai omis quelques détails (genre la relation triangulaire Tamako – Mochizou – Midori) mais le plus important a été dis. Surtout que ce qui nous intéresse, c’est bien le film.

Tamako Love Story est donc la suite de Tamako Market et prends place quelques temps après la fin de la série (Tamako est entrée en troisième année depuis). Et si le film s’introduit par une scène de vie quotidienne du trio Dera, Choi et Mecha, c’est pour mieux les écarter par la suite. Ils ne feront pas partie de l’histoire principale cette fois-ci et c’est tant mieux. D’ailleurs, leur absence montre à quel point ils pouvaient être gênants dans la série. Bref, ils ne seront pas de la partie et j’ai beau bien les aimer, c’est tant mieux.
Avec le film, on va donc s’intéresser davantage au personnage de Tamako mais également de Mochizou. Leur relation sera justement au centre de l’intrigue puisqu’elle prendra une toute autre dimension, émotionnellement comme narrativement. Parce que leur romance, assez peu traitée dans la série tv, est prise bien plus au sérieux ici. À la manière du film qui se veut généralement plus « mature », malgré un coté comédie toujours présent mais largement effacé. Un changement assez radical de ton qui s’exprime en premier lieu au niveau du visuel.

S’il est coutumier qu’un film se voit doter de moyens autrement plus conséquents qu’une série tv, ainsi que d’une deadline potentiellement plus flexible (le film est sorti un an et demi après Tamako Market), la différence ne se résume pas que là pour Tamako Love Story. Le changement se voit également au niveau du style, bien plus réaliste.
Là où la série était une comédie colorée et enjouée, le film arbore une palette de couleurs plus ternes. Le ton est ainsi beaucoup plus réaliste et sérieux, surtout que des éléments presque absurdes (l’oiseau-robot-machin Dera en premier) ne sont plus là. Autre élément qui appuie ce changement de style, l’utilisation d’effets de flous sur les décors. Surtout utilisé dans les scènes en extérieur, ce procédé permet de mettre en avant les personnages tout en donnant une dimension cinématographique à l’animation. On reverra d’ailleurs cette idée dans l’excellent Sound ! Euphomium, la série du printemps 2015. C’est un artifice qui fonctionne terriblement bien, donnant l’illusion de voir la scène au travers d’une véritable caméra, avec l’effet de profondeur de champ que cela implique. Résultat, on est bien plus capté par le récit car son aspect parait beaucoup moins artificiel que de l’animation traditionnelle.

Cette dimension cinématographique s’incarne également dans la conception du storyboard. Le choix du cadrage des plans, leur découpage et leur variété font persister la sensation qu’une caméra existe réellement et filme les personnages. Et encore une fois, la sensation créée est excellente : le film nous parait réel et renforce un peu plus le sentiment de réalisme qui en dégage. J’insiste sur cet aspect de la réalisation car il est capital pour le récit, qui se veut très sérieux. Mais aussi parce que KyoAni a un véritable savoir-faire dans ce domaine, surtout Naoko Yamada, la réalisatrice. Elle était déjà à l’oeuvre sur K-ON !! dont la saison 2 était mémorable sur ce point. Et dans Tamako Love Story c’est la même chose. Le monde dans lequel se situe l’histoire est vivant et le studio met toujours le paquet pour qu’on le ressente. Ça peut s’incarner avec des voitures circulant en fond, des passants ou les autres élèves du lycée.
D’autres éléments rendent la réalisation du film excellente, comme la lumière, toujours très bien gérée. Les expressions et mouvements des personnages s’accordent très bien avec leur caractère et la situation, un savoir-faire propre encore une fois à Yamada. Une excellente réalisation qui fait prendre une toute autre dimension à l’oeuvre. Et tant mieux, parce qu’il fallait au moins ça pour sublimer l’histoire de Tamako Love Story.

Comme son titre l’indique, le film raconte l’histoire d’amour de Tamako. Et cette romance concerne également, sans surprise, Mochizo. Lui qui jouait de malchance ou d’un certain manque d’audace. Mais les choses changent, la fin du lycée approche et il va partir étudier à Tokyo. Ne voulant pas garder un éternel regret, Mochizo n’a plus le choix : il doit faire sa déclaration auprès de Tamako.
Mais ce n’est pas tout : autour de Tamako, tout bouge avec l’approche de son diplôme. Ses amies ont toutes une idée de ce qu’elles feront plus tard contrairement à Tamako qui souhaite juste reprendre la boutique de mochi familiale. Un choix par défaut, en somme. Mais elle commence du coup à comprendre que le quotidien qu’elle est en train de vivre ne sera pas éternel et qu’il va devoir bientôt cesser. Sentiment littéralement exprimé par Kanna qui désire se faire un souvenir marquant avec le club de majorette (dans lequel elle est avec Tamako, Midori et deux jumelles – et une fille random – ). De quoi semer le trouble dans la tête de Tamako. Jusqu’à la survenue d’un certain événement qui va définitivement la bouleverser.

Mêlant doutes sentimentaux et peur de l’avenir, le film exprime ainsi une véritable histoire adolescente. L’idylle que vivait jusque là Tamako n’est pas éternelle, ou en tout cas est vouée à changer. Et c’est une crainte forte chez elle, causée par la mort de sa mère quand elle était enfant. Elle a maintenant peur de perdre les gens qui lui sont chers, souhaitant alors que ce quotidien paisible continue éternellement. Et c’est ce qui l’effraie quand ses amies parlent de leur avenir, ça va insuffler du changement dans sa vie, avec des départs qu’elle ne peut empêcher.

– Ce paragraphe contient des spoilers –
La romance est bien présente, mais subtilement. Le film se concentre plutôt sur les troubles qui peuvent entourer ce genre de situations. La déclaration de Mochizo aura un véritable effet coup de poing sur Tamako. Elle paniquera et, tout le long du film, se questionnera sur ses propres sentiments. Et Mochizo sera lui dans la situation de celui contraint d’attendre. C’est très classique mais magnifiquement bien mené. La relation entre Tamako et Mochizo est bien illustrée par de nombreux éléments dans le film, notamment le mochi (parce que mochi, Mochizo, vous l’avez ? ahah c’est drôle……). Plus sérieusement, ce jeu de mot un peu ridicule illustre parfaitement le trouble qui habite Tamako à ce moment-là. Et l’élément le plus parlant sur leur relation, c’est le « téléphone-yaourt ». Celui qu’ils utilisent depuis toujours pour communiquer entre leurs deux maisons. Et que Tamako n’arrivait jamais à attraper quand Mochizo le lui lançait. Alors que dans la scène finale, elle y parvient, comme si elle était enfin réceptive aux sentiments de Mochizo. Par ailleurs, la fin du film est formidable. Tamako se déclarant à Mochizo, ne pensant alors plus le revoir, avec un « Je t’aime » sur fond noir avant de montrer successivement leur réaction brillait par sa simplicité. Au contraire d’être brusque, elle apporte la finalité idéale au film. Une conclusion sur de purs sentiments, et rien d’autre.

Tamako Love Story fait prendre une toute autre dimension à Tamako Market. En partant d’une comédie (très) sympathique et mignonne, le film parvient tout de même à raconter une romance émouvante qui se mêle aux questions adolescentes de l’avenir. Sa plus grande force se trouve dans la sobriété de sa mise en scène et la simplicité de ses dialogues. La réalisation permet à l’histoire de prendre une tournure très réaliste et mature, malgré un matériau de base assez enfantin. KyoAni et Naoko Yamada signent là une énorme performance avec un film impressionnant. Un film, sincèrement, plein d’amour.



2 réponses à “Tamako Love Story – Amour de mochi”

  1. Je n’aime ni K-On! et Tamako Market m’a vraiment ennuyé.
    En revanche le film était excellent, je vous rejoins complètement.
    La symbolique autour du “yaourt-téléphone” m’a vraiment marqué 😮 avec la fin _

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