Il pleut à Tokyo. Voilà à peu près tout ce que je savais niveau histoire pour Les Enfants du Temps avant d’aller le voir. Son seul staff suffisait largement à me donner envie. Ne serait-ce que pour voir la nouvelle oeuvre de Makoto Shinkai, qui avait fait rêver le monde entier avec Your Name en 2016. Ainsi que le retour de Masayoshi Tanaka au chara design et de Radwimps à la musique. Ça a beau être mon habitude, rarement j’ai été aussi dans le flou sur ce qu’un film allait me raconter en entrant dans la salle. En même temps, après la claque qu’était Your Name trois ans plus tôt, je ne savais pas trop quoi attendre de la nouvelle oeuvre de Shinkai. Et une nouvelle fois, j’ai pris une véritable claque.

Commençons par une évidence : le film est magnifique. Ne serait-ce qu’au travers de ses décors, illustrant un Tokyo somptueux aux couleurs chatoyantes. La patte Shinkai, que j’adore, donne beaucoup de fraicheur à l’atmosphère très urbaine du film. La lumière est très soignée, ce qui était au moins nécessaire pour un film où la dualité pluie/soleil est centrale. Evidemment, la pluie aussi était magnifique, mais bon quand t’as fait The Garden of Words c’est un peu une évidence.

La beauté du film s’inscrit également dans ses détails. Des bouts de verdure dans les rues au désordre des appartements, Shinkai sait sublimer des choses simples du quotidien. Les repas en sont le parfait exemple représentant des moments chaleureux et de partage. Comme le premier que Hodaka et Hina partageront ensemble. Le plat associe des ingrédients fournis par l’un et l’autre, tout en étant improvisé. Ce qui est assez caractéristique de leur mode de vie à ce moment du film.

J’ai grave envie de me refaire leur repas

La réussite de ces passages passe également par de bons personnages. Son duo de protagonistes fonctionne à merveille et m’a directement charmé. Je me suis rapidement amusé de voir Hodaka et Hina interagir ensembles. C’était d’autant plus plaisant qu’à l’inverse de Your Name, ils se côtoient bien plus. Leurs interactions sont savoureuses, emplies d’une innocence adorable qui les rend follement attachants. L’excellent character design de Masayoshi Tanaka aide aussi grandement. En plus d’être joli, il est très expressif. C’est d’autant plus vrai pour Hodaka qui tire assez souvent des tronches bien marquées. Ce qui correspond bien au candide immature qu’il est. Pour les personnages secondaires, on n’est pas en reste. La malicieuse Natsumi et le cynique Keisuke constituent un agréable foyer pour Hodaka. Nagi, petit frère de Hina et vrai Don Juan, ferme le cercle des protagonistes secondaires du film. Pour les autres, notamment les policiers, leur impact est essentiellement symbolique.

C’est autour de ce chouette casting que va se construire petit à petit le mythe de la fille-soleil. Un don propre à Hina qui lui permet d’invoquer le soleil en le priant. Ce qui s’avère assez pratique vu les pluies diluviennes qui s’abattent sur Tokyo. Même si je ne comprends pas en quoi c’est exceptionnel, c’est juste le temps habituel en Bretagne. Fortement soutenu par Hodoka, elle va commencer à rendre service aux gens qui ont besoin de soleil dans leur vie (littéralement). Tout ira alors pour le mieux pendant quelques semaines pour nos héros, satisfaisants demandes sur demandes.

Ne sont-ils pas adorables franchement ??

C’est même un point qui m’a perturbé la première fois que j’ai vu le film. Durant une bonne moitié, on ne sait pas vraiment où va aller l’histoire. Non pas qu’elle est inintéressante, loin de là. C’était très plaisant de suivre nos héros vivre leur petite vie de “prieurs du soleil”. Mais j’avais quand même l’impression de tenir un carton qu’on remplissait d’éléments d’intrigue qui se révèleront utiles que bien plus tard. Malgré ça, le film propose un dénouement suffisamment intéressant et riche en émotions pour justifier un pareil déséquilibre.

L’une des thématiques principales du film est cette jeunesse qui peine à trouver sa place dans un monde en pleine tourmente. Classique certes, mais joliment illustré ici avec l’opposition de la jeunesse insouciante de ses héros et une froide réalité. Hodaka, profondément candide et naïf, agit de manière immature face à la vie. Il a fugué de chez lui et de ses responsabilités en espérant pouvoir vivre sa vie par lui-même à Tokyo. Des ambitions que les autres personnages ne se priveront pas de relever avec humour. Et c’est la même chose pour Hina, devant travailler pour subvenir à ses besoins et ceux de son frère tentant d’avoir une vie heureuse dans un contexte morose.

Les protagonistes du film sont avant tout des jeunes qui tentent
de se faire une place dans un monde tourmenté

Quand les ennuis arrivent, incarnés par les policiers enquêtant sur la fugue de Hodaka, il est déchirant de les voir se faire rattraper en plein rêve. La pluie dans tout ça apparait comme une métaphore assez évidente des problèmes environnementaux actuels, contre laquelle les deux jeunes protagonistes seraient appelés à lutter malgré eux. Une situation qui amènera Hodaka à grandir, évolution d’un héros qui voulait se la jouer adulte sans en avoir les épaules.

Juste une image de Hina à son taf car elle est trop cool

Si le film s’était arrêté là-dessus, on aurait pu lui reprocher d’être un brin moralisateur sur la maturité. Il véhicule au contraire un message bien plus honnête. Dans une scène complètement folle, sublimée par le morceau de RADWIMPS et Tôko Miura “Grand Escape”, Makoto Shinkai livre une morale à la fois fine, positive et pessimiste.

Tenki no Ko nous hurle avec tendresse et amour que même si c’est la merde, il ne faut pas arrêter de chercher à avoir une vie heureuse. C’est pour cela que j’adore ce film. Il est profondément positif tout en ayant conscience de sa propre naïveté face à un contexte compliqué. Ce n’est pas de l’optimisme facile. C’est une invitation à ne pas tomber dans la fatalité et de garder le sourire face à l’avenir.

Je pense que Your Name reste le film le plus abouti (techniquement et scénaristiquement) du réalisateur. Par contre, ce dont je suis sûr, c’est que Les Enfants du Temps est mon nouveau Shinkai préféré, de part sa franchise et sa bienveillance.



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